Je me suis mise au milieu de ça, de nulle part, et les enfants en ont fait notre chez nous en quelques jours. Ils jouent et font du bruit pendant que j’installe nos affaires. Je me suis débarrassée du souvenir imprécis de leurs pères. L’espace sur le plateau est presque sans limite.
Le froid sur mes mains, sur la terre creuse des gerçures. J’examine ma peau douloureuse. Je devine du bout des doigts comment se termine loin de moi le corps de ces hommes. J’ai déjà vérifié cette incompatibilité entre leur dénouement sans fin et le mien, jusqu’à quel point nos solitudes ne se compléteraient jamais, avec quelle facilité elles ne sont complices que pour agrandir encore ce jeu, ce mal ajustement entre nous.
Pour être chez moi, récit, édition du Rouergue, mars 2002