Pendant que mon webmaster et mon fils aîné bricolent (ouf, bientôt du carrelage dans la pièce principale…), j’avance sur Les Mains gamines. Chacun ses activités manuelles, et, à part nettoyer après les travaux, je suis incapable de faire quoi que ce soit d’autre dans la maison, tant je suis maladroite. Ecrire, donc.
J’intègre, dans quelque chose qui ressemble à un texte, des petits bouts écrits ça et là, des notes.
D’habitude, j’ai alors un petit plaisir maniaque : en plus de barrer les notes intégrées (ou celles auxquelles j’ai renoncé définitivement) pour savoir où j’en suis, je déchire les petits feuillets arrachés au carnet, et je les jette avec jubilation.
Mais depuis que je fréquente le blog d’Armand Dupuy, je procède différemment : lorsque toutes les notes d’un feuillet ont été utilisées, je les glisse dans une enveloppe à son nom, parce qu’il fait la collec des manuscrits.
J’ai finalement renoncé à la réception, trop compliqué, et trop explicite sur le “but” du personnage principal (qui ne prendra jamais la plume…). Le roman devrait donc s’achever au moment où la réception commence, au moment où les invités arrivent.
Tiens, ça me rappelle cette très belle chanson de Léonard Cohen : “One by one, the guests arrive / The guests are coming through / The open-hearted many / The broken-hearted few”*
J’ai été contrainte d’utiliser plusieurs narratrices, on verra ce que ça donne.
Il y a plusieurs façons de faire, soit changer de voix en changeant de chapitre comme ici, soit intégrer ce changement de focalisation dans le corps du texte sans changer de chapitre comme là. Mais là, donc, il y a chaque fois passage d’un narrateur à une narratrice, ou vice versa, on comprend donc très vite que ce n’est plus la même personne qui parle, or dans Les Mains gamines, je ne peux pas donner la parole aux hommes, ce n’est pas possible (pas plus qu’au personnage principal), car ce sont eux les “propriétaires“ des mains gamines et le but de l’écriture de ce texte n’est pas d’essayer de les comprendre, de savoir comment aujourd’hui, devenus adultes, trentenaires, et surtout devenus personnages, comment ils peuvent vivre avec leurs mains, car JE NE VEUX PAS LE SAVOIR. Mais en écrivant, c’est-à-dire en transposant, en traduisant, en faisant ce grand écart de la représentation (d’où l’impossibilité d’écrire en focalisant sur le personnage principal, qui demeurera ”de côté“, tout en faisant son ménage…), en écrivant, je veux essayer de répondre à la question : est-ce que les mains devenus adultes ont une influence quelconque sur les femmes, mères, filles de ces hommes, est-ce que les gestes de l’enfance finissent par s’effacer, ou se poursuivent-ils dans les corps (l’inconscient, diraient les psy, mais je ne suis pas psy, donc je travaille directement sur les corps) des filles qui les entourent ?
Sinon, le reste du temps, je prépare des cours, je corrige des travaux bien sûr, mais aussi je me mets sur la balancelle, et je lis, je lis, je lis, car à chaque fois que je suis en période d’écriture (c’est-à-dire quand même, assez souvent) il me faut lire, lire, lire… mais tourner le spages moi je dis, c’est une activité (et)manuelle comme une autre…
* Un par un arrivent les invités
Arrivent les invités
Les coeurs ouverts nombreux
Les coeurs brisés plus rares